Sur la Promenade des Anglais, le Negresco attire tous les regards avec sa façade Belle Époque et sa coupole. Un vrai hôtel musée qui abrite une collection riche de 6 000 œuvres d’art.
Le peintre Dali, la Princesse Grace de Monaco, les Beatles, Louis Armstrong, Ernest Hemingway et bien d’autres ont foulé les marches du Negresco au fil du temps. Aux têtes couronnées ont succédé les stars du show-biz, d’Anthony Quinn à Michael Jackson, en passant par Elton John. Romy Schneider y a également vécu un peu de son idylle avec Alain Delon. Et ce lieu mythique est le dernier palace familial de l’Hexagone resté français.
Petite anecdote, Elton John y a tourné en partie le clip de sa chanson « I’m still standing » (à la fin).
Un peu d’histoire
Fascinante trajectoire que celle d’Henri Negrescu, né à Bucarest en 1870. A treize ans, il quitte la Roumanie pour Paris, sans argent mais riche d’ambitions et surtout d’un état : il était fils d’aubergiste. Ascension fulgurante, Negrescu devenu Negresco, passe par Monte-Carlo et Londres, commis puis maître d’hôtel puis directeur, sachant se rendre indispensable, côtoyant une élite cosmopolite où se mêlaient souverains et rois des affaires tels Vanderbilt ou Rockefeller.
Enfin, il est directeur du restaurant du Casino municipal de Nice, et c’est à ce moment qu’il pense édifier sur la promenade des Anglais un hôtel de luxe portant son nom. Un riche capitaine d’industrie, André Darracq, des automobiles et moteurs d’avion du même nom, finance le projet.
Conçu par l’architecte de la Belle Époque, Édouard-Jean Niermans, doté de luxes inouïs comme la stérilisation de l’eau par rayons ultraviolets, une turbine centrifuge assurant le nettoyage par le vide des couloirs ou la distribution du courrier directement dans les chambres par un système de pneumatique, il dépassa aussitôt en prestige du Carlton à Cannes et du Normandy à Deauville. La légende dit que la célèbre coupole rose de l’hôtel reproduisait avec fidélité le sein de la maîtresse de son propriétaire.
Le Negresco ouvre ses portes en janvier 1913. Lors de son inauguration, pas moins de sept têtes couronnées vinrent contempler le grand hall elliptique de style Louis XVI.
Le succès est immédiat. La première année d’exploitation, le palace réalise un bénéfice de 800 000 francs en or ! Hélas, la Première Guerre mondiale éclate et son établissement est transformé en hôpital de guerre. À la sortie de la guerre, Henri se retrouve sans le sou. Croulant sous les dettes, il meurt d’un cancer en 1920, à seulement 52 ans.
Le Negresco est alors repris par un groupe hôtelier belge et tout ce que la planète compte de riches héritiers et de richissimes industriels se pressent à nouveau au Negresco. Le phénix renaît de ses cendres. Mais la Seconde Guerre mondiale se profile et à la fin du conflit, le palace n’est plus qu’une ombre.
Vie mondaine et soirées chics, le mythe se perpétue avec Jeanne Augier et son mari Paul, qui rachètent le Negresco en 1957. Bien décidés à ce que le Negresco retrouve toute sa noblesse, les Augier font en quelques années passer le nombre d’employés de 76 à 260. Et ils mettent un point d’honneur à ce que l’art français y trouve un écrin.
En 2015, Le Negresco est rentré dans le cercle très fermé des institutions « Entreprise du Patrimoine Vivant ». Ce label officiel est une marque de reconnaissance créé par l’État Français pour distinguer des entreprises aux savoir-faire artisanaux et industriels d’excellence.
Nos amis les bêtes, sont plus qu’admis, ils sont invités à fouler de leurs petites pattes le perron du 37 Promenade des Anglais, comme en son temps le guépard de Salvador Dalí.
L’art dans tous ses états

On peut avoir séjourné dans les hôtels les plus prestigieux de la planète, rien ne prépare à l’exception Negresco… Et cette exception, on la doit à Jeanne Augier, sa dernière propriétaire qui a fait du Negresco l’hôtel musée qu’on admire aujourd’hui. Son secret le mieux gardé: l’hôtel a son propre atelier d’art et emploie à l’année un restaurateur, des tapissiers, un marbrier et deux ébénistes de l’école Boulle.
Sous la verrière du salon Royal dessinée par Gustave Eiffel, des œuvres de Niki de Saint Phalle côtoient un portrait de Louis XIV et seuls ceux qui ont visité le Louvre et Versailles connaissent ce troisième exemplaire. On reste bouche bée devant son lustre de Baccarat de 4,60 mètres et 16.800 cristaux, une merveille destinée à l’origine au tsar Nicolas II de Russie (on peut admirer le jumeau au Kremlin).






Les formes sexy de la Nana Jaune de Niki de Saint Phalle dans le Salon Royal donnent le ton aux sept tapis aux couleurs très 70’ commandés spécialement à l’artiste Raymond Moretti. Un portrait de Louis Armstrong par Raymond Moretti, une toile de Vasarely, un tableau de Mignard, une affiche de René Gruau (l’hôtel en possède la plus grande collection privée) complètent l’ensemble.






Se balader dans les couloirs et salons du Negresco c’est parcourir un joyeux mélange d’époques et de styles. Des salons dédiés à Louis XVI ou à Napoléon III jusqu’aux 124 chambres et suites vénitiennes ou «street art», on n’est pas au bout des surprises.



Jeanne Augier, sa charismatique propriétaire
Jeanne Augier a fait du Negresco le lieu d’art qu’on connaît aujourd’hui. Collectionneuse compulsive, elle a mélangé les styles et les couleurs, donnant un nouvel élan aux palaces qui jusqu’alors n’osaient utiliser que le marron, les beiges et le vert bouteille dans la décoration pour ne pas faire de l’ombre aux tenues de ses clientes.
Elle possédait 97% du Negresco, acheté par son père en 1957 et qui aurait une valeur de 300 à 400 millions d’euros, selon une estimation de 2016, hors mobilier et œuvres d’art.
Dans les années 60, le shah d’Iran prendra conseil de Jeanne Augier pour la création d’un palace à Ispahan, et le Ritz de Montréal s’est offert ses talents de décoratrice.
Au sultan de Brunei qui souhaite lui racheter le Negresco, elle répond qu’il est trop cher pour lui. Bill Gates lui fait un cheque en blanc et il essuie le même refus. Idem, pour une proposition arrivée du Maroc: «Nous achetons, le prix importe peu.» Rien n’y fait. Madame est très «cocorico», comme elle aimait le rappeler et le Negresco restera français!
Il y a quelques années, l’annonce de la création d’un fonds de dotation « Mesnage-Augier-Negresco » pour la «lutte contre la souffrance humaine et animale», à laquelle Jeanne Augier a légué son hôtel et quelques autres biens privés, avait défrayé la chronique, chacun y allant de sa version des Aristochats des temps modernes. Les bénéfices vont au développement de l’hôtel, à la défense des animaux, aux handicapés et au « rayonnement de l’art français ».
Les restaurants et bar

Un patrimoine où la cuisine tient toute sa part, le Negresco proposant deux restaurants:
Chantecler, le restaurant gastronomique, est étoilé au Guide Michelin.
Et la brasserie La Rotonde, qui est une véritable institution chère au cœur des Niçois. Récemment rénovée avec ses tons or et blanc, et ses chevaux de manège qui viennent ponctuer le décor. La Rotonde est une version chic et décontractée de la Riviera.
Virginie Basselot est l’une des figures de la nouvelle génération du paysage gastronomique français. Meilleur Ouvrier de France, elle est aux commandes du restaurant étoilé Le Chantecler, de La Rotonde, du room-service et des banquets depuis 2018. Dans l’histoire du palace, c’est la première fois qu’une femme coiffe la toque de chef.
Pour la petite histoire, j’ai choisi de vous parler du Negresco car c’est là que nous avons récemment fêté notre cinquième anniversaire avec Mr Echoesofmytravels. Et j’ai choisi cet endroit chargé d’histoire en partie pour la légende Negresco et en partie car le fondateur était roumain, et comme certains d’entre vous le savent, je suis moi-même d’origine roumaine. Nous avons dîné à La Rotonde, l’endroit est effectivement très surprenant. Concernant le dîner en soi, au sujet du plat linguine et bisque de homard bleu, je suis un peu partagée, les pâtes n’étaient pas « al dente ». Toutefois, le service était à l’hauteur et les desserts divins.
Clap de fin de ce weekend anniversaire avec quelques images de Nice et du bord de mer.
